Comment sortir vraiment de la récession?

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Comment sortir vraiment de la récession

Par Gérard LAFAY 

Professeur émérite à l’Université Panthéon-Assas Paris II

paru dans [wpfilebase tag=fileurl id=8 linktext=’Valeurs actuelles, 22 aout 2013′ /]

En France, la montée continue du chômage résulte du ralentissement de plus en plus net de la croissance, découlant de la perte de compétitivité de notre économie. Cette récession française est amplifiée par la situation de nos voisins, car la monnaie unique européenne est devenue surévaluée vis-à-vis de la plupart des autres monnaies. Seule l’Allemagne semble s’en accommoder, grâce à la stagnation de ses salaires et à la qualité remarquable de son appareil productif, en accumulant des excédents au détriment de ses partenaires.

Si la Banque Centrale Européenne, sous la houlette de Mario Draghi, mène maintenant une politique moins restrictive que celle conduite auparavant par Jean-Claude Trichet, son objectif essentiel est de préserver la survie de l’euro. C’est pourquoi, pour sortir de ce cercle vicieux, la majorité des économistes met en avant la nécessité d’accomplir de vraies “réformes structurelles”. L’idée est séduisante, mais elle recouvre en réalité deux formes très différentes.

La première correspond à l’assouplissement du marché du travail. Si celui-ci est sans doute nécessaire, il n’est le plus souvent qu’un euphémisme pour désigner la baisse des salaires. Cette politique est d’ores et déjà mise en œuvre dans des pays d’Europe du Sud, où elle atteint de 20 % à 30 % en Espagne, au Portugal ou en Grèce. Les diminutions de salaires ainsi pratiquées ont pour effet de redresser la compétitivité, mais les prix baissent beaucoup moins que les salaires, de sorte que le pouvoir d’achat des ménages diminue. Une telle déflation a donc pour effet de réduire la consommation privée, conduisant à abaisser la croissance économique et à élever encore le chômage. Rappelons-nous les expériences historiques de l’entre-deux-guerres : d’abord celle du Royaume-Uni en 1924, lorsque le Chancelier de l’Échiquier Winston Churchill voulut à toute force rétablir la parité ancienne entre la monnaie britannique et l’or, provoquant l’effondrement de l’industrie britannique ; ensuite celle de la France en 1935, où Pierre Laval ouvrit la voie au Front Populaire, avant de sombrer dans la collaboration pendant l’occupation allemande.

La seconde forme de réformes structurelles est beaucoup plus utile car elle correspond à l’amélioration du fonctionnement de l’État. Elle doit se traduire par une baisse de la part des dépenses publiques dans le PIB, et donc de celle des impôts nécessaires à les financer. Or, à cet égard, la France est l’un des pays les plus mal placés, cette part dépassant 56 %. Pour éviter qu’une telle réforme structurelle ne corresponde qu’à des coupes budgétaires aveugles, il convient d’analyser sereinement la situation.

En fait, sept facteurs permettent d’expliquer la montée continue en France, depuis quarante ans, de la part des dépenses publiques dans le PIB :

–        l’accumulation incessante de lois et de règlements, aggravée par les directives européennes, exigeant une bureaucratie pléthorique afin de les appliquer ;

–        l’entrée massive d’immigrés, de moins en moins assimilés, attirés par notre modèle social généreux qui, de ce fait, est devenu de plus en plus coûteux ;

–      la diminution du poids relatif des actifs dans l’ensemble de  la population, due d’abord à un allongement de la durée de vie, combiné avec l’avancement indu de l’âge de la retraite, la montée du chômage et des préretraites ;

–        la superposition des échelons de l’administration territoriale, entraînant des chevauchements de compétences et une gestion clientéliste ;

–        l’inadaptation de notre fiscalité, décourageant l’esprit d’initiative et faisant porter les cotisations sociales sur le travail, ce qui pénalise la production nationale ;

–        la dégradation de notre système éducatif, affaiblissant la qualité de notre main d’œuvre tout en s’avérant d’un coût prohibitif ;

–        la charge croissante de la dette publique, versée à la finance internationale, alors que jusqu’en 1973 les déficits étaient couverts par la Banque de France.

Ces sept facteurs indiquent les axes de réformes structurelles douloureuses, allant de pair avec une restauration de l’autorité de l’État. Il est clair, cependant, que celles-ci ne pourront produire leurs effets que graduellement. Or, depuis le lancement de l’euro, les différences structurelles d’inflation ont créé une situation intenable. La dégradation de la compétitivité de la majorité des pays de la zone – dont la France  – a engendré chez eux une dette extérieure nette, tandis qu’une minorité des autres pays, derrière l’Allemagne, est au contraire devenue créancière.

Dans l’immédiat, pour corriger tant cette divergence de compétitivité que la surévaluation globale de de l’euro, la seule solution est d’opérer un démontage concerté de celui-ci. Ceci implique, pour la France, une dévaluation externe réussie, comme en 1958 et en 1969, rétablissant la croissance dans un délai inférieur à dix-huit mois. Si François Hollande demeure aveuglément attaché à la survie de la monnaie unique européenne, il va s’avérer incapable de sortir notre pays du cercle vicieux de la récession.

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