Un héros français

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ON attendait, bien sûr, l’éditorial que Christian Authier allait consacrer à cet événement. Il est à la hauteur de l’attente. Il fait écho à l’édito d’Elisabeth Levy ” Un héros malgré nous” et souligne combien la France s’est plongée dans la médiocrité et est à 1000 lieux de l’idéal présenté par le Colonel Beltrame, médiocrité revendiquée par une icône de la “gauche” académique, Guillaume Duval, qui s’inquiète de ce que cet acte puisse devenir une référence et déranger la médiocrité statutaire qui fait son pouvoir. On a appris que le syndicat Sud éducation ait appelé au boycott de la journée d’hommage qui incite les Français « à faire don de leur vie à une nation qui les dépasserait ».  La médiocrité serait-elle devenue une vertu révolutionnaire?

CR

EDITION N°3339 - PARU LE 30/03/2018 - ECRIT PAR Christian Authier
Le sacrifice du lieutenant-colonel Arnaud Beltrame face à la barbarie islamiste nous oblige à nous montrer dignes de lui.

Les querelles familiales autour de l’héritage de Johnny Hallyday, le statut du cheminot, Nicolas Sarkozy mis en examen pour des soupçons de financement libyen de la campagne présidentielle de 2007, des facultés bloquées par des étudiants ne voulant pas étudier : voici quelques-uns des sujets qui mobilisaient l’attention des médias la semaine dernière. L’avenir du chroniqueur people Jeremstar sur la chaîne C8 ainsi que celui de Christine Angot dans l’émission de Laurent Ruquier sur France 2 ne laissèrent pas non plus indifférents les professionnels de l’information ni les réseaux sociaux. Le vendredi 23 mars, ce babillage fut balayé par les attaques terroristes de Carcassonne et de Trèbes ayant causé la mort de quatre personnes dont celle du lieutenant-colonel Arnaud Beltrame dans la nuit de vendredi à samedi.

Mourir pour sauver des vies

De fait, le réel et la tragédie ont repris le dessus – l’espace de quelques heures – sur le dérisoire, le trivial, l’insignifiant dont nous abreuve la grande machine à décerveler médiatico-spectaculaire. Inutile de revenir sur les circonstances du sacrifice de cet officier tant son attitude a été foudroyante de simplicité et d’évidence.

Évidemment, il n’a pas fallu attendre trop longtemps avant qu’éditorialistes et autres analystes projettent leurs opinions sur un acte et un homme irréductibles à toute récupération partisane. Sans surprise non plus, les basses polémiques politiques et la démagogie de quelques arsouilles n’ont pas tardé à se répandre. Peu importe. Au-delà de l’inévitable et nécessaire hommage national rendu à Arnaud Beltrame ce mercredi, son acte marquera durablement les esprits et les cœurs des Français.

À l’antipode de la mort recherchée par les terroristes en emportant avec eux le plus de vies possibles, cet homme est mort pour sauver des vies. Il n’a pas cherché la mort, elle est venue à lui. Plutôt mourir debout que de vivre à genoux. On pourrait ne voir dans les événements de Carcassonne et de Trèbes qu’une énième étape dans la guerre qu’a déclarée le terrorisme islamique à la France.

Pourtant, le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame nous offre un modèle, une référence. Il incarne ce que nous avons de meilleur. Il nous oblige. Il est une réponse au nihilisme des assassins. De l’horreur des attentats qui nous frappent depuis 2007 avec les tueries de Montauban et de Toulouse peut paradoxalement surgir le meilleur. Souvenons-nous des passagers du Thalys (trois Américains un Britannique, un Français et un Franco-Américain) qui au péril de leur vie évitèrent un carnage et maîtrisèrent le terroriste. Souvenons-nous de ce policier de la BAC qui le soir des attentats de novembre 2015 se précipite à l’intérieur du Bataclan, muni de sa seule arme de service, et abat l’un des terroristes. Souvenons-nous, ce même soir, d’autres gestes : le chef de la sécurité de la salle sauvant des centaines de vies en évacuant des spectateurs, un homme secourant une femme enceinte suspendue à un balcon, un jeune homme protégeant de son corps une amie à la terrasse de La Belle Équipe et recevant à sa place une rafale de mitraillette fatale… Souvenons-nous aussi des Niçois qui tentèrent d’arrêter le camion du tueur le 14 juillet 2016 et de tant d’autres héros «ordinaires» tel ce client de l’Hypercacher essayant de désarmer le terroriste avant que celui-ci ne l’abatte d’une balle dans la tête.

Entretenir la flamme

À son tour, et de manière radicale, le lieutenant-Colonel Beltrame a pris place dans la compagnie de nos héros. Certes, sa fonction et sa vocation l’avaient préparé au sacrifice ultime, mais un si grand courage ne cesse d’impressionner et n’est pas donné à tous les soldats. Ce vendredi 23 mars, chez celui qui servit le drapeau pendant plus de vingt-deux ans, notamment en Irak, l’honneur et ses réflexes ont pris le pas sur la conscience et ses positions latitudinaires.

Quand prospèrent les tigres de papier, les donneurs de leçons, les adeptes du «Y a qu’à» et du «Faut qu’on», lui a agi. Tous les Français – ceux qui croient au ciel et ceux qui n’y croient pas, ainsi que l’écrivait Aragon dans le poème La Rose et le Réséda dédié aux résistants monarchistes et communistes – peuvent se reconnaître en Arnaud Beltrame. Ce fervent catholique et franc-maçon nous inspire humilité, admiration et fierté.

Il nous rappelle que mourir n’est pas forcément subir et son exemple doit nous guider dans le combat à venir, il doit guider ceux qui nous gouvernent comme chacun d’entre nous. «Il a pris une décision qui n’était pas seulement celle du sacrifice, mais celle d’abord de la fidélité à soi-même, de la fidélité à ses valeurs, de la fidélité à tout ce qu’il avait toujours été et voulu être, à tout ce qui le tenait (…) Ce que nous vous devons, c’est qu’il ne soit pas mort en vain, que sa leçon demeure gravée dans le cœur des Français. Sa mémoire vivra, son exemple demeurera, j’y veillerai, je vous le promets», a déclaré Emmanuel Macron lors de l’éloge funèbre de mercredi en saluant «l’esprit français de résistance» incarné par le gendarme.

Le nom se son assassin sera oublié, celui d’Arnaud Beltrame résonnera longtemps. Dans une société qui manque de repères et de modèles, qui glorifie l’insignifiance et la médiocrité, il éclaire nos pas et, encore une fois, nous oblige. Après le recueillement, il s’agira de se montrer digne de lui, d’entretenir la flamme face à la barbarie islamiste. De répéter comme une promesse les paroles du Chant des partisans écrites par Joseph Kessel et Maurice Druon quand les nazis occupaient la France : «Ami, si tu tombes, un ami sort de l’ombre à ta place».

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