La disparition brutale de Coralie Delaume est un choc à plusieurs titres. Un cancer foudroyant à 44 ans qui emporte une jeune femme intelligente, distinguée, résolue, à l’humour redoutable est une douleur qui ne peut laisser de marbre même ceux qu’elle croquait.
Je ne la connaissais que de loin. J’apprends que son vrai nom était Laura Blanc, qu’elle avait fait une carrière d’officier, ce qui explique sans doute la détermination de son caractère et l’habilité de ses attaques. Elle avait de la classe, ne parlait jamais de sa vie privée sinon de ses chats. Elle avait l’intelligence et la modestie des grands.
Quand je l’ai connue elle était liée à un groupuscule, la gauche populaire, qui n’était pas de son niveau, mais elle prit vite son autonomie. Elle venait au séminaire franco-russe de Jacques Sapir, je la rencontrais dans des réunions, je la lisais avec délectation. Avoir été capable d’allier humour et analyse détaillée de l’Organisation de Bruxelles, pour reprendre feu Maurice Allais, est un exploit en tout point remarquable. David Cayla a eu une chance exceptionnelle de travailler avec elle et doit porter lourdement son deuil aujourd’hui.
Nous n’étions pas de la même génération, elle aurait pu être ma fille. La lire et la rencontrer était le bonheur de voir qu’une nouvelle génération prenait le relais de la mienne, celle de 1968, qui a tout raté, ayant hérité d’une France parmi les grandes puissances mondiales dont l’université rassemblait les meilleures intelligences du monde et laisse un pays en voie de tiers-mondisation.
Son humour redonnait le goût de vivre par ses formules qui alliaient humour, grâce et pertinence, comme cette description de François Hollande « l’homme qui a élevé la vacuité consensuelle au rang de discipline olympique ».
Coralie, tu vas nous manquer à un point que nous avons encore peine à imaginer. On rêve déjà des commentaires acérés que tu aurais faits sur la dernière macronerie qu’est l’annonce d’un référendum sur le climat.
Elle était de la race des nouvelles élites dont nous avons besoin. Elle a mis la barre très haut, à nous de nous y élever.
CR