La désinformation sur l’euro continue
Jean-Yves Archer vient de publier coup sur coup deux tribunes, une dans Atlantico, une autre dans Les Echos, pour dire tout le mal qu’il pense du démontage de la monnaie unique,idée soutenue par neuf « prix Nobel d’économie ». L’occasion de démonter ses arguments.
Un saut sans parachute ?
Commençons par le plus facile. Pour les Echos, Jean-Yves Archer affirme que le démontage de la monnaie unique européenne reviendrait à un « saut sans parachute ». L’image est habile, anxiogène, en somme la dernière ligne de défense des partisans de la monnaie unique : faire peur en affirmant que le retour à des monnaies nationales provoquerait une catastrophe. Nous avons droit à tous les arguments habituels, à savoir explosion de la dette, baisse de la valeur de l’épargne. L’auteur affirme même que nous n’en tirerions aucun bénéfice commercial du fait de l’achat de composants.
Premier point, habituel avec les défenseurs de la monnaie unique européenne, c’est l’absence d’exemples tirés de l’histoire pour illustrer leur propos. Il nous promet les sept plaies d’Egypte en s’appuyant sur un discours qui ne repose sur aucun fait concret. Car le problème, c’est que les fins d’union monétaire sont des choses relativement banales puisque pas moins de cent ont été terminées lors du 20ème siècle, et l’avis des économistes (notamment Jonathan Tepper) est unanime : la fin d’une union monétaire provoque très peu de perturbations et permet aux économies de rebondir rapidement. Le cas de la Tchécoslovaquie est très parlant, comme le reconnaît François Lenglet dans son livre.
Plus en détail, l’explosion de la dette est un fantasme puisque notre dette serait convertie en nouveau franc, de même qu’elle avait été convertie en euro avant, car elle est essentiellement de droit français. Sur la perte de l’épargne, cela est faux. Le prix des produits français restant stables, la valeur de l’épargne serait stable. Bien sûr, le prix des produits importés monteraient, mais pas ceux des produits italiens ou espagnols. Enfin, il est tout de même ubuesque de dire que la dévaluation ne permettrait pas d’augmenter les exportations, fait économique empiriquement et théoriquement incontestable.
Le problème du rachat de nos entreprises
Point qu’il développe particulièrement dans son papier pour Atlantico, et plus difficilement contestable, le fait que la baisse de la valeur du franc risquerait de provoquer une vague de rachat des entreprises françaises par des entreprises étrangères. Le point est logique : si la valeur de nos entreprises baissaient d’un coup de 20%, on peut imaginer que cela intéresserait les acheteurs chinois ou étasuniens. Mais on peut le contester. D’abord, il ne faut pas surestimer l’ampleur potentiel du phénomène : toutes les entreprises de Suède et de Grande-Bretagne n’ont pas été rachetées après leur dévaluation.
Ensuite, un Etat peut toujours mettre en place des règles de protection permettant d’éviter les OPA ou les rachats non souhaités. L’Italie, par exemple, a refusé le rachat d’Alitalia par Air France il y a 5 ans. Ce que les Italiens ont fait, nous pouvons le faire. Et, dans le cas des entreprises qui exportent, une dévaluation serait sans doute compensée par une hausse des cours, du fait de la plus grande compétitivité coût et que les revenus extérieurs génèreraient plus de francs. Enfin, le redémarrage économique produirait une amélioration globale des comptes et donc des cours de bourse.
Comme toujours, des tribunes de défense de la monnaie unique continuent d’être publiées sans réponse. De manière intéressante, leur seule ligne consiste à prédire une catastrophe en cas de démontage. En fait, la catastrophe est sous nos yeux depuis trois ans et demi, du fait de l’euro.
Lire ma synthèse et ma vidéo d’explication sur le démontage de la monnaie unique