Le système national d’économie politique

Partager cet article:
Print Friendly, PDF & Email

Le système national d’économie politique de Friedrich List

est une oeuvre majeure de la pensée économique. Publiée en 1841, elle est la première oeuvre consacrée à réfuter les thèses de l’’économie classique qui, face à la puissance révélée par la révolution industrielle, prétend que, en rupture avec la tradition de la philosophie politique classique, le politique devient second. Dans l’économie politique d’Adam Smith, c’est le politique, l’Etat, qui est premier, chez Jean-Baptiste Say, il est devenu second, réduit au gouvernement, qui « n’entre qu’accessoirement dans ce système de choses » [1].

C’est Friedrich List qui le premier remet en cause cette lecture. List avait commencé sa carrière comme avocat du libre-échange et du laisser-faire. Mais au cours de son exil aux Etats-unis (1825 – 1830), sa vison des choses change, qui donnera naissance à sa théorie du Système National d’Economie Politique. Pour List, au contraire des classiques,

« la puissance importe plus que la richesse … la puissance est pour un pays une force qui procure de nouveaux moyens de production, parce que l’arbre qui porte les fruits a plus d’importance que le fruit lui-même. (…) à l’aide de la puissance un pays non seulement acquiert de nouveaux moyens de production, mais s’assure de la possession des anciens et la jouissance des richesses déjà acquises, et parce que le contraire de la puissance ou la faiblesse livre aux mains des puissants tout ce que nous possédons, nos richesses et nos forces productives, notre civilisation, notre liberté, jusqu’à notre indépendance nationale» (1856 : 155, 156).

L’inspiration de List est à recherche chez Alexander Hamilton qu’il rencontra dans son exil aux Etats-Unis dans les années 1820 lors de son exil : investissements dans les infrastructures de communication avec le développement du réseau ferré, investissement dans l’éducation sur fond d’expansion démographique – c’est la Prusse qui aura le premier système d’enseignement obligatoire – et la formation d’ingénieurs, protection des industries dans l’enfance avec la création du Zollverein, qui annoncera la politique de puissance politique que réalisera le Reich par l’unification allemande après la victoire sur la France en 1870. List aura le premier conçu et préconisé la mise en œuvre d’un système national d’innovation au travers de son Système National d’Economie Politique : construction de réseau de transport (le réseau ferré sera un élément décisif de la victoire de la Prusse contre la France en 1870), politique éducative et puissance publique comme architecte du développement des activités productives.

Tout comme l’Angleterre des XVIII° et XIX° siècle, les États-Unis ont su et savent pratiquer l’inversion de l’effet et de la cause en faisant du libre-échange le levier de leur succès alors qu’il est le résultat de la puissance accumulée par le protectionnisme. L’artifice démonté par Friedrich List en 1841 qui consiste, une fois parvenu au faîte de la puissance, à « rejeter l’échelle avec laquelle on l’a atteint, afin d’ôter aux autres le moyen d’y monter après-nous » (List, 1856) fonctionne toujours et n’est de nos jours démonté que par très peu d’auteurs comme le professeur Ha Joon Chang dans son percutant Kicking Away the Ladder.

Ce faisant, l’économie dominante est passée d’une approche évolutionniste du monde qui transforme son environnement pour être ensuite transformé par lui, à une approche « adaptationiste » où les choses sont données, figées et accessibles en passant sous les fourches caudines de la pensée dominante. L’évolution ne consiste plus à façonner son environnement en faisant co-évoluer sa propre structure, mais en considérant l’environnement comme donné et suivant sa propre évolution indépendante de toute action intentionnelle de l’homme et des institutions qu’il crée pour organiser le développement des sociétés.

Il faut donc donc lire et relire le Système national d’économie politique: c’est une étude historique et politique remarquablement écrite et très lisible à tout honnête homme.

J’utilise pour cette édition en ligne celle réalisée par le site La recherche du bonheur qui est une mine de documentation et publie de nombreux classiques, dont je ne saurai que trop conseiller la fréquentation.

 


[1] Cette séparation de l’économie et du politique est un trait spécifique à l’œuvre de Say. Un commentateur, cité par Bourcier de Carbon (1971 :227), écrit en 1938 « les erreurs que selon nous M. Say a commises nous paraissent résulter de ce qu’il n’a pas compris la liaison des faits économiques avec les faits politiques… Nous nous contenterons d’affirmer que si l’économie politique, en tant qu’elle s’occupe du mécanisme matériel de la production, est indépendante de la politique, elle lui est intimement unie en tant qu’elle s’occupe de la répartition des produits entre les membres de la société ; que sous ce rapport il est impossible de faire un bon traité d’économie politique, si l’on ne s’est pas rendu compte d’abord des lois qui doivent régir l’organisation sociale ; qu’autrement, on s’expose à constater comme nécessaires, comme définitifs, des phénomènes qui, de par leur nature, sont passagers, variables, qui peut-être au moment où on les constate sont parvenus à leur terme et tendent à disparaître ».

NOUVELLE PRÉFACE DU TRADUCTEUR

PRÉFACE DU TRADUCTEUR (1ère édition)

NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR FRÉDÉRIC LIST

SYSTÈME NATIONAL D’ÉCONOMIE POLITIQUE

PRÉFACE DE L’AUTEUR

INTRODUCTION

LIVRE PREMIER. L’HISTOIRE

CHAPITRE

I – Les Italiens

II – Les Anséates

III – Les Flamands et les Hollandais

IV – Les Anglais

V – Les Espagnols et les Portugais

VI – Les Français

VII – Les Allemands

VIII – Les Russes

IX – Les Américains du Nord

X – Les leçons de l’histoire

LIVRE DEUXIEME. LA THÉORIE

CHAPITRE

I – L’économie politique et l’économie cosmopolite

II – La théorie des forces productives et la théorie des valeurs

III – La division nationale des travaux et l’association des forces productives du pays

IV – L’économie privée et l’économie nationale

V – La nationalité et l’économie de la nation

VI – L’économie publique et l’économie de l’état ; l’économie politique et l’économie nationale

VII – L’industrie manufacturière et les forces productives, personnelles, sociales et politiques du pays

VIII – L’industrie manufacturière et les forces productives naturelles du pays

IX – L’industrie manufacturière et les forces instrumentale, ou capitaux matériels du pays

X – L’industrie manufacturière et l’intérêt agricole

XI – L’industrie manufacturière et le commerce

XII – L’industrie manufacturière et la navigation marchande, la puissance maritime et la colonisation

XIII – L’industrie manufacturière et les instruments de circulation

XIV – L’industrie manufacturière et le principe de conservation et de progrès

XV – L’industrie manufacturière et les stimulants à la production et à la consommation

XVI – La douane comme moyen puissant de créer et d’affermir l’industrie manufacturière du pays

XVII – La douane et l’école régnante

LIVRE TROISIÈME. LES SYSTÈMES

CHAPITRE

I – Les économistes italiens

II – Le Système industriel, improprement appelé par l’école Système mercantile

III – Le Système physiocrate ou agricole

IV – Le Système de la valeur échangeable, appelé à tort par l’école Système industriel. – Adam Smith

V – Continuation du précédent – Jean-Baptiste Say et son école

LIVRE QUATRIÈME. LA POLITIQUE

CHAPITRE

I – La Suprématie insulaire et les puissances continentales. – Les États-Unis et la France

II – La Suprématie insulaire et l’Association douanière allemande

III – La Politique continentale

IV – La Politique commerciale de la nation allemande

FIN DU SYSTÈME NATIONAL

<

p style=”text-align: justify;”>°°°——————————–ooo0ooo——————————–°°°

Partager cet article: