Incendie de Notre-Dame: le dessous des cartes

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On apprend ainsi que l’île de la Cité est l’objet d’un projet d’urbanisme de grande ampleur, mais difficile à mettre en oeuvre compte tenu des protections dont bénéficient ces sites classés. L’incendie de Notre-Dame tombe à pic pour le lancer, ce qui explique l’enthousiasme du pouvoir et de ses sbires pour annoncer une “reconstruction” de la cathédrale selon les canons de “l’art contemporain” et les oligarques qui en sont les promoteurs, François Pinault et Bernard Arnault, annoncèrent illico qu’ils mettaient les millions sur la table (qui leur seront bien évidemment retournés sous forme de crédit d’impôt).

Il s’agit de faire coup double:

  • Couper le monument de son attache chrétienne, honnie de manière générale par les oligarques qui ne jurent que par théorie du genre et relativisme obsessionnel, pour en faire un machin “de notre temps”.
  • Faire du pognon en transformant l’île de la Cité en centre touristique en la livrant aux affairistes experts à faire de l’argent avec des fonds publics, comme l’explique l’article que je reproduis ci:-dessous (je manie Thierry Meyssan avec précaution mais là il est dans le juste).

J’ai connu le sieur Belaval quand il était directeur des stages d’entreprises à l’ENA. C’est le genre d’individu avec lequel s’est installée immédiatement une franche haine, animée – de sa part – par un absolu mépris de classe. Il m’expliqua que je ne comprenais rien à l’entreprise et que j’étais une honte pour l’école. Je fis après – avec succès – une carrière en entreprise tandis que lui, avec son ami Dominique Perrault, était en charge de la conception et du lancement de la bibliothèque François Mitterrand. Six mois après son ouverture la bibliothèque était en grève générale car ces deux lascars n’avaient tenu aucun compte des conditions de travail du personnel (bibliothécaire est un métier très qualifié) ni de stockage des livres. Il a fallu qu’une nouvelle direction embauche de véritables managers pour reconcevoir la bibliothèque avec le personnel et les lecteurs pour la rendre fonctionnelle. J’ai présenté cette étude de cas dans mon livre L’innovation une affaire d’Etat.

48heures après l’incendie, la presse des oligarques, L’OBS en tête, annonçait que tout interrogation sur l’origine de l’incendie était une offensive de “l’extrême-droite”. On comprend   maintenant l’empressement du pouvoir à déclarer, sans aucun fondement, que l’incendie ne pouvait être qu’accidentel, en avançant des explications les plus fantaisistes!

CR

L’incendie de la cathédrale Notre-Dame

Lorsque l’incendie de Notre-Dame a débuté, le 15 avril 2019 au soir, tous les médias français et beaucoup d’étrangers, se sont tournés vers la cathédrale en feu. De nombreuses télévisions étrangères ont débuté leur journal par cette nouvelle, mais pas France2.

La chaîne publique avait prévu de le consacrer au discours annoncé du président Macron concluant le « Grand débat national ». La rédaction, complètement sonnée par l’émoi provoqué par ce drame imprévu, y consacra son journal, non sans avoir au préalable regretté que le président reporte son discours sine die ; un discours à ses yeux beaucoup plus important.

La froideur de la plupart des journalistes et la stupidité des commentaires à chaud des politiques ont soudainement montré le gouffre béant qui sépare leur univers mental de celui des Français. Pour la classe dirigeante, la beauté de Notre-Dame ne saurait faire oublier que c’est un monument de la superstition chrétienne. Au contraire, pour le public, c’est le lieu où les Français se réunissent en tant que peuple pour se recueillir ou rendre grâce à Dieu.

En termes de communication, il y aura probablement un avant et un après cet incendie : une majorité de Français a été sidérée par ce sinistre, et révoltée par l’indifférence arrogante de sa classe dirigeante.

L’île de la Cité et l’industrie du tourisme

Immédiatement, le président de la République, Emmanuel Macron décidait non pas de reconstruire Notre-Dame, mais de réaliser un projet difficile qui attendait dans des tiroirs depuis deux ans et demi.

En décembre 2015, une mission avait été commanditée par le président de la République de l’époque, François Hollande, et la maire de Paris, Anne Hidalgo. Elle dura une année entière alors qu’Emmanuel Macron était ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique.

De nombreuses personnalités y ont participé, dont Audrey Azoulay, alors ministre de la Culture et aujourd’hui directrice de l’Unesco [1], ou le préfet Patrick Strzoda, alors directeur de cabinet du ministre de l’Intérieur et aujourd’hui d’Emmanuel Macron.

Elle était dirigée par le président du Centre des monuments nationaux, Philippe Bélaval, et l’architecte Dominique Perrault.

Constatant que l’île de la Cité est, depuis son remodelage par le Baron Haussmann au XIXème siècle, un complexe administratif fermé au public, hébergeant la Sainte-Chapelle et la cathédrale Notre-Dame de Paris, la mission proposa de la transformer en une « île-monument ». L’opportunité en est fournie par le déménagement du Palais de Justice, la réorganisation de la Préfecture de Police et de l’hôpital de l’Hôtel Dieu. Il sera en effet possible de tout réorganiser.

La mission a ainsi listé 35 chantiers coordonnés, dont la création de voies de circulation souterraines et la mise sous verrière de nombreuses cours intérieures, pour faire de l’île la promenade obligée de 14 millions de touristes annuels et, éventuellement, des Français.

Le rapport de la mission [2] évoque l’incroyable valeur commerciale de ce projet, mais ne dit pas un mot de la valeur patrimoniale, particulièrement spirituelle, de la Sainte-Chapelle et de Notre-Dame qu’elle aborde exclusivement comme des sites touristiques, sources potentielles de revenus.

Malheureusement cet ambitieux projet ne pouvait, selon ses auteurs, être réalisé rapidement non pas tant du fait de l’absence de financement que des lourdes habitudes administratives et des énormes contraintes juridiques. Bien qu’il n’y ait que peu d’habitants sur l’île, la moindre expropriation peut durer des décennies. Plus étonnant, le directeur du Centre des monuments nationaux semblait regretter l’interdiction de détruire une partie du patrimoine pour mettre en valeur une autre partie. Etc.

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Le projet de la mission Bélaval/Perrault

Les choix de l’Élysée

Dans les heures qui suivirent, il fut évident que des fonds très importants seraient offerts par des donateurs allant du simple citoyen à de grandes fortunes. L’objectif de l’Élysée fut donc de mettre en place une autorité capable de mener à fois la reconstruction de Notre-Dame et la transformation de l’île de la Cité.

Le lendemain, 16 avril, au cours d’une intervention télévisée, le président Macron déclarait : « Alors oui, nous rebâtirons la cathédrale Notre-Dame plus belle encore, et je veux que cela soit achevé d’ici 5 années » [3]. Oublions le « je veux » caractéristique non d’un élu républicain, mais d’un chef d’entreprise. 5 ans, c’est extrêmement court, surtout au regard du siècle et demi de la construction de la cathédrale. Cependant c’est le temps nécessaire pour que les travaux soient terminés à temps pour les touristes des Jeux olympiques de 2024 et de l’Exposition universelle qui était planifiée pour 2025. C’était la date prévue par la mission Bélaval-Perrault.

Le surlendemain, 17 avril, le Conseil des ministres fut entièrement consacré aux conséquences de l’incendie. Trois décisions importantes furent actées :
- Nommer l’ancien chef d’état-major des armées, le général Jean-Louis Georgelin, pour conduire depuis l’Élysée une mission de représentation spéciale « afin de veiller à l’avancement des procédures et des travaux qui seront engagés » ;
- Faire adopter par le parlement un projet de loi [4] régissant la collecte de fonds, régularisant la nomination du général Georgelin qui a atteint la limite d’âge et surtout exemptant sa mission de toutes les procédures d’appel d’offres, des lois de protection du patrimoine, et de toutes les contraintes qui pourraient survenir ;
- Lancer un concours international d’architecture pour reconstruire Notre-Dame.

Une autre décision était prise : étouffer tout débat sur les causes de l’incendie afin d’éviter qu’une enquête judiciaire ne vienne perturber ce bel agencement.

Le mensonge d’État

Immédiatement, le nouveau procureur de la République de Paris, Rémy Heitz, nommé sur intervention personnelle d’Emmanuel Macron, assure que la piste criminelle n’est pas privilégiée et que l’incendie est lié à un accident de chantier.

Cette assurance provoque une levée de bouclier chez les experts du site, pompiers, artisans et architectes, pour qui aucun élément de chantier n’était capable de provoquer un tel incendie, à cet endroit et à cette vitesse.

L’insistance du Procureur et celle du préfet de Police, Didier Lallement, à prendre position à un moment où aucun enquêteur n’avait été en mesure de se rendre sur le lieu de l’incendie atteste de l’élaboration d’une version officielle qui ne contraigne pas à de longues investigations bloquant le site. Elle alimente aussi les interrogations sur la piste arbitrairement écartée, celle d’un acte anti-chrétien ou anti-religieux, notamment dans le contexte du vandalisme contre les églises (878 profanations en 2017), de l’incendie volontaire de l’église Saint-Sulpice le 17 mars, voire de l’incendie de la mosquée Al-Marwani sur l’esplanade d’Al-Aqsa à Jérusalem.

En outre, sachant que la majorité des grands incendies intervient dans le cadre de projets immobiliers, l’hypothèse d’un acte volontaire pour permettre la transformation de l’île de la Cité doit être examinée.

Ces questions sont toutes légitimes, mais en absence d’enquête aucune réponse définitive ne l’est.

Certes, l’objectif du président Macron est louable, mais sa méthode est bien étrange. Certes, il n’est pas possible de lancer un tel chantier sans changer les règles de droit, mais si la nomination d’un officier général de premier plan est une garantie d’efficacité, ce n’en est pas une de respect du droit.

[1] Audrey Azoulay a été élue grâce au lobbying de la France, alors que la tradition veut qu’un pays ne soit pas à la fois l’hôte d’une institution internationale et son président, et que ce poste avait été promis à une personnalité arabe. C’est au titre de directrice qu’elle publiera un communiqué portant acte de candidature de l’Unesco : « Communiqué de l’Unesco sur l’incendie de Notre-Dame de Paris », Réseau Voltaire, 16 avril 2019.

[2] Mission île de la Cité. Le cœur du cœur, Philippe Bélaval et Dominique Perrault, La Documentation française, 2016.

[3] « Discours d’Emmanuel Macron sur la reconstruction de Notre-Dame de Paris », par Emmanuel Macron, Réseau Voltaire, 16 avril 2019.

[4] « Projet de loi pour la restauration et la conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris et instituant une souscription nationale à cet effet », Assemblée nationale, N° 1881, enregistré le 24 avril 2019.

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