De l’incompétence informatique en gestion publique

Partager cet article:
Print Friendly, PDF & Email

Loading

De l’or pour les braves

Prenez un colonel bien sous tous rapports. A l’été 2010, ce colonel déménage, d’un point de la région parisienne à un autre et hors d’un contexte de mutation. Comme ce changement ne modifie en rien sa situation administrative, il se contente de signaler le changement d’adresse à l’occasion lors du point de situation administratif qui est effectué régulièrement, c’est-à-dire à la fin de 2011.
Le 12 mars 2012, ce colonel reçoit une lettre du Centre expert des ressources humaines et de la solde qui lui fait remarquer que comme il a quitté son logement le 1er septembre 2010, il ne peut plus prétendre à toucher la Majoration de l’indemnité de charges militaires (MICM, un petit moins de 600 euros), la prime de logement censée aider les militaires à se loger en région parisienne. Le colonel a beau expliquer qu’il suffit de changer son adresse sur son dossier, rien n’y fait. Il doit absolument rembourser au plus vite ce qu’il a touché et faire une demande pour percevoir à nouveau la MICM. On lui rendra alors ce qu’il vient de rembourser. Discipliné, le colonel en question accepte d’être en demi-solde pendant deux mois et demi et effectue la démarche administrative requise (et inutile).
Au mois de juillet suivant, il reçoit, sans explication, une régulation de MICM correspondant à la moitié de ce qu’il a donné. La MICM ne réapparait pas pour autant sur son bulletin de solde. Il finit par s’en inquiéter mais entre temps, son dossier a été transmis de son organisme de soutien à la base de défense locale en cours de création. Tout est à recommencer avec ces contraintes supplémentaires que l’Institut auquel il appartient n’est pas relié à la BDD par l’indispensable logiciel Concerto et qu’il faut trouver un créneau entre les arrêts maladie de la fonctionnaire civile qui assure la transmission des documents. De son côté, le trésorier de la BDD doit prendre en compte à la fois la nouvelle structure et la multiplicité des problèmes à traiter. Il est donc débordé. Un appel à un numéro d’urgence aboutit au rappel de la réglementation du caractère dégressif de la réglementation, ce qu’il savait déjà (et l’étonne toujours) et surtout ne règle en rien son problème. Arrive rapidement le moment de la mutation qui heureusement a lieu dans le cadre de la même BDD. Entre temps se sont greffés deux autres problèmes.
Les conférences prononcés dans différentes écoles militaires donnent droit à  des « indemnités d’enseignement » alignés, a priori, sur le modèle de l’université. Le colonel en question prononce assez régulièrement des conférences qui nécessitent malgré tout un peu de travail préalable. Il travaille ainsi une semaine complète pour préparer deux journées continues de cours à l’Ecole de guerre tunisienne, où on lui explique qu’elle a accord avec l’Ecole de guerre française qui elle-même lui explique qu’elle a un accord avec l’Institut où travaille et qu’elle ne paiera jamais aucune de ses conférences. Les autres conférences prononcées à l’Ecole militaire ont eu de leurs côtés la fâcheuse tendance à disparaître lors du passage à la structure BDD. De temps en temps, il voit passer une « indemnité d’enseignement » sur son bulletin de solde avec une somme qui ne correspond à rien et sans aucune référence. Le colonel estime avoir perdu environ 1 500 euros dans l’affaire mais se dit qu’il est quand même bien payé (5 390 euros net au dernier bulletin mensuel) et qu’après tout l’enseignement fait partie de son métier.
Plus important, le même colonel a fait partie en septembre et octobre 2012 pendant cinq semaines d’un jury de concours. Cette période, relativement exigeante et qui impose un double travail, fait l’objet d’une indemnité de plusieurs milliers d’euros. Treize mois plus tard, cette indemnité n’est toujours pas payée. Le total cumulé de la dette de l’institution à son égard se situe alors dans une fourchette entre 10 000 et 15 000 euros.
Le 20 novembre 2013, il reçoit enfin un courrier du Centre expert qui l’informe qu’en 2011, il a indument touché pendant trois mois une indemnité exceptionnelle dont il ignorait même l’existence et…un trop perçu de MICM dans la période qu’il a déjà remboursé. L’ensemble représente 3 477, 33 euros à payer au plus tôt. Il répond qu’il ne fait plus confiance au Centre expert et qu’il en marre qu’on le prenne pour un con. Il refuse donc de payer et se demande s’il ne va pas porter plainte contre les incompétents qui ont créé cette situation.
Calculez le degré de dévouement mais aussi de lassitude des militaires français. Vous avez quatre heures.
Publié par à 12/20/2013
Partager cet article:

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.